Jean-Marc Chouvel
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I. De ma fenêtre II. Paradoxe de la lucarne  III. …and the Pursuit of Happiness…   IV. Métamorphose de l'instant 



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Les fenêtres du temps

Ce cycle de 4 pièces explore les possibilités de la vidéo en concert. Les musiciens jouent en temps réel avec l’image et la bande, mais tout autant qu’une mixité audio-visuelle, c’est l’ensemble des caractéristiques complexes de notre système perceptif et cognitif qui est mis à l’épreuve. Le titre du cycle fait référence à la nécessité, pour analyser une «scène», d’en tracer des contours, à la fois en termes d’image — c’est la notion de «cadre» — mais aussi, et c’est plus difficile à appréhender, en termes de temporalité. Chaque pièce du cycle explore donc les possibilités sensibles d’une situation particulière, où le thème de la fenêtre, cher aux peintres, tient une place prépondérante.




                             
De ma fenêtre (1998)
Violoncelle, électroacoustique et vidéo

Violoncelle : Benjamin Carat
Vidéo : Philippe Chapuis

La gageure de cette pièce, qui entame l’ensemble du cycle, est d’avoir été réalisée intégralement à partir de matériau sonore captés depuis la fenêtre de mon appartement parisien. Philippe Chapuis a poursuivi la gageure en reprenant à son compte la même contrainte pour la réalisation vidéo. Pour la première fois, le violoncelle de De ma fenêtre utilise un archet préparé, ce qui permet des textures de timbre et une réalité sonore tout à fait particulière, que l’on retrouvera sous d’autres angles dans l’ensemble du cycle.




Fenêtres
C'est dans la compagnie des peintres que l'importance des fenêtres dans notre appréhension du monde m'est apparue pour la première fois.
La Fenêtre n'est pas un objet. Ce n'est pas non plus une paroi. Ce n'est que le contour de la transparence, le vide du mur. C'est quelque chose de terriblement quotidien et réaliste, d'inaperçu aussi, et à la fois de métaphorique et d'abstrait, ouvert à une méditation infinie. C'est la limite, si on s'en tient à la surface, de l'intérieur et de l'extérieur, du dedans et du dehors. C'est aussi le passage de la lumière, et le passage du regard, selon notre nécessité ou notre agrément.
Il n'y a pas de civilisation sans fenêtre. La fenêtre est le symptôme même de l'urbanité. Meurtrière, elle s'est enfoncée dans d'épaisses parois de roc. Aujourd'hui, les édifices entiers sont de verre.
Pour les cinéastes, le cadre, c'est à la fois la profondeur d'une visée et la surface d'un écran. La magie d'un monde qui peut apparaître et disparaître à volonté.
Quand on se met à y réfléchir, le thème peut même se révéler harcelant. Je me souviens encore de ce poème du jeune Aragon…
 
                     Persiennes
                                                                   Persiennes
                                           Persiennes


Mais que sont les fenêtres pour un musicien ? Un cadre que construirait notre perception autour d'« objets sonores » ? Une sorte d'échafaudage évanescent, un mirage de notre analyse ? Ou peut-être ces moments où le son existe puis s'éteint ?
Les acousticiens parlent de transitoires d'attaque, et on a l'impression qu'il s'agit presque de parasites, alors que l'on sait pertinemment qu'il s'agit là d'une composante essentielle du timbre. Enlevez cet élément et le piano est une cloche, le tuba une flûte… Quant à la terminaison du son, qui lui accorde la moindre importance? Beethoven, dans ses cadences?…
Je me suis alors rendu compte que dans ma musique, je soulignais toujours ces moments de début et de fin des sons, qu'il y avait des marqueurs de commencement et de fin de séquence, que j'appuyais presque systématiquement les articulations entre deux moments différents.
J'ai pris conscience alors que la fenêtre, que l'on ouvre, qui amène à l'oreille toutes les effluves sonores du monde, puis que l'on referme pour retrouver l'intimité du silence intérieur, avait beaucoup à nous dire sur notre rapport au son et au temps.
 

La muse et l'électron
Windows (en Américain).
 
Dans le monde de l'informatique, la fenêtre est devenue l'équivalent de la page, mais une sorte de page mouvante, le pupitre d'un univers en expansion, le syndrome d'un réseau parallèle, d'un labyrinthe ouvert sur le monde et à la fois complètement déconnecté d'avec la réalité du monde.
La muse et l'électron, cela pourrait être une fable dont la morale reste encore à définir… Evoquer bien sûr la musique électronique, sans en rester là… Evoquer l’articulation entre un monde ancien et un monde nouveau. Evoquer l’allégorie métaphysique et l’élément physique, l’intuition et la technologie… Etablir comme une résonance d’événements… Gagner de l’énergie par une sorte d’excitation commune… Approcher ce que l’on pourrait appeler un mythe du futur…

Avec les nouvelles techniques de montage, proposer une véritable polyphonie sonore et visuelle, quitter, pour la vidéo, le séquencement bout à bout, jouer avec le cadre de l'écran comme s'il n'était plus une limite imposée, jouer avec la transparence de l'écran, comme si un monde pouvait aussi exister derrière…
 

De ma fenêtre
Balayer devant sa propre porte…
Pendant deux ans, j'ai effectué des enregistrements à partir de la fenêtre de mon appartement. J'ai accumulé petit à petit quelque chose comme quatre heures de matériau sonore. Et à l'écoute de ces documents, j'ai été stupéfait par la richesse et par la diversité des sons enregistrés. C'est presque trop de profusion par rapport aux sons qu'on a l'habitude d'utiliser en studio. Toujours, on apprend à cacher le bruit, à plonger les micros dans un silence parfait, à les focaliser sur une seule source. Dans la vie, il en est tout autrement, et nous sommes baignés d'une multitude de faits sonores qui participent ensemble à notre perception du monde.
Faire une pièce, alors, avec ce matériau ?
La virtuosité du montage ne pouvait pas être l'élément unique du travail musical. Il fallait autre chose, à commencer par éviter une segmentation trop volontariste, et ne cerner au fond que l'anecdote. Ainsi, pour prendre une certaine distance par rapport à cette présence immédiate de l'image, il m'a semblé tout à fait opportun d'y mêler les sons du plus intimement humain des instruments : le violoncelle. Un violoncelle comme explosant, lui aussi, de sonorités inouïes, imitatif presque, lyrique, en retour.
De ma fenêtre serait alors une sorte d'ouverture pour un spectacle plus vaste, une manière de réduction et de proposition préliminaire, un avant-propos pour un opéra moderne de plus vastes dimensions.



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Le Paradoxe de la Lucarne (2003)
Saxophone, contrebasse, électroacoustique et vidéo

Saxophone : Josetxo Silguero
Contrebasse : Gonzalo Tejada
Vidéo : Jean-Marc Chouvel


El arte es una mímesis; pero no es el mundo lo mimetisado.
El arte imita lo ausente y lo acerca hasta esos umbralesen los que el sentimiento puede adivinarlo.

Enrique Pajón Mecloy(El irrealismo)


L’art est une mimesis ; mais ce n’est pas le monde qui est l’objet du mimétisme.
L’art imite ce qui est absent, et le rapproche de cette pénombre dans laquelle le sentiment peut en deviner la présence.

Enrique Pajón Mecloy (L’irréalisme)


Deuxième pièce de la série des Fenêtres du Temps, Le Paradoxe de la Lucarne a été écrit en 2003 pour saxophone et contrebasse sur des images tournées les années précédentes dans le grenier d’une maison du sud-ouest de la France. Sous le titre Les Fenêtres du Temps seront réunies une série de partitions faisant appel à la vidéo d’une manière fondamentalement différente de l’illustration sonore des musiques de film.
La première pièce, De ma Fenêtre, réalisée en collaboration avec le cinéaste Philippe Chapuis, confrontait l’univers instrumental du violoncelle à l’univers sonore capté depuis la fenêtre d’un appartement parisien. La fenêtre marquait la transition entre deux mondes, un passage entre intérieur et extérieur. La lucarne du Paradoxe désigne sans doute une autre forme d’extériorité, et ce n’est plus tant le monde existant que le sens de la création et la perception du réel qui sont interrogés. L’univers sonore déployé dans la pièce prolonge le huis-clos présenté par les images. Les instruments explorent leurs limites physiques les plus intimes, provoquant les extrêmes du possible. Les multiphoniques du saxophone et l’archet « préparé » de la contrebasse trouvent une étrange connivence avec la « créature » de métal qui apparaît à l’écran.
Cette œuvre n’aurait pas été possible sans la complicité du sculpteur Laurent Golon.





... and the pursuit of happiness... (2007)
Flûte, clarinette, trompette, alto, électroacoustique et vidéo.

Giovanni Mancuso dirige l’ensemble Laboratorio Novamusica
Flûte : Cecilia Vendrasco
Clarinette : Stefano Cardo
Trompette : Ilich Fenzi
Alto : Piergabriele Mancuso
Vidéo : Jean-Marc Chouvel

Troisième pièce du cycle ...and the pursuit of Happiness... parle du rapport de l’homme moderne à cette fenêtre sur le monde bien particulière qu’est la télévision. Les fenêtres sont ces ouvertures qui permettent à l’information de traverser la surface des peaux qui nous enveloppent. L’artiste viennois Hundertwasser disait de l’homme qu’il avait trois peaux : celle de chair, ses habits, et les murs de ses maisons. Mais la télévision troue une quatrième peau, dont nous n’avons pas toujours conscience : celle de notre esprit, celle du langage, complexe, des mots, des sons et des images, qui enveloppent notre esprit.
... and the pursuit of happiness...
Cette formule célèbre de la déclaration d’indépendance des État-Unis revenait fréquemment dans mon esprit quand les radios et les télévisions retransmettaient les événements de la deuxième guerre du golfe. En faisant de moi le témoin du déroulement d’opérations militaires que je réprouvais, les télévisions me confrontaient à la pire impuissance qui soit : celle devant la mort donnée volontairement au nom d’une falsification des idéaux fondateurs. Cette expérience d’un conflit entre deux flux de conscience — celui formaté par la chaîne américaine CNN et celui d’un être là, d’un être sur terre arrimé à des racines bien plus profondes — irrigue la pièce. On le retrouve dans un conflit ouvert entre les images, entre les images et la musique, entre le plaisir des sens et la réalité du sens, entre la violence irruptive de l’action et la distance insondable de la contemplation.



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Métamorphose de l’instant (2006)
Électroacoustique et vidéo : Jean-Marc Chouvel
(sur une séquence du documentaire de Philippe Chapuis : Métamorphoses d'une ville)

La quatrième et dernière pièce du cycle ne fait pas appel aux instruments. Elle est réalisée simultannément avec la musique d’un documentaire de Philippe Chapuis sur la ville de Lyon, d’après un rusch de quelques dizaines de secondes tourné lors de la destruction de l’hôpital Saint-Luc, en plein centre de la ville. En cherchant à comprendre tout ce que véhiculaient ces quelques images, c’est toute une psychanalyse de nos sensations visuelles et sonores qui se met en marche et vient conclure une réflexion sur notre capacité à voir et à appréhender la réalité du monde.

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